Vendredi dernier, c’était la journée mondiale de lutte contre le sida. Le sujet n’est ni drôle, ni sexy. Mais c’est l’occasion de vous faire un petit récapitulatif sur les MST et les IST… Et surtout, sur comment s’en protéger, notamment en milieu libertin, parce qu’une sexualité libérée n’implique pas forcément de collectionner les microbes.
Je ne vais pas vous faire la morale, ni vous balancer des injonctions. Le risque zéro n’existe pas, à moins de copuler en tenue de cosmonaute (et encore…). Mais quelques précautions suffisent pour réduire considérablement le danger encouru, afin de pouvoir papillonner à souhait, tout en préservant sa santé et celles des autres.
Quoi qu’il en soit, le premier pas est d’être bien renseigné. Ensuite, c’est à vous de décider quel degré de précaution vous souhaitez prendre.
Voici quelques conseils pour minimiser les risques, notamment lors de pratiques libertines. Ces conseils sont également valables pour les non-libertins adeptes des coups d’un soir ou des partenaires irréguliers.
Quelques chiffres sur le VIH
Combien de personnes sont atteintes du VIH ?
En France, on estime que 153 000 personnes vivent avec le VIH. Chaque année, environ 6000 personnes découvrent leur séropositivité, et le nombre de personnes séropositives qui l’ignorent est estimé à 25000.
Quel est le risque de contamination lors d’une exposition au VIH ?
Déjà, cela dépend du type de rapport sexuel. Plusieurs études ont permis d’obtenir des estimations :
- Lors d’une relation anale passive : 1,4 %
- Une relation vaginale passive : 0,08 %
- Relation anale active : entre 0,06 et 0,062 %
- Relation vaginale active : 0,04%
- Concernant le sexe oral, trois études ont eu lieu, lors desquelles aucune contamination n’a été observée. Toutefois, ces études ont porté sur une nombre de personnes trop faible et sur une trop courte période pour pouvoir en conclure en conclure que le risque de transmission lors des relations sexuelles orales est nul.
Les facteurs augmentant le risque de transmission du VIH
Ces chiffres semblent assez faibles, ils pourraient presque paraître “rassurants”. Mais ce sont des statistiques “moyennes” pour un unique rapport.
D’autres facteurs entrent en jeu et peuvent multiplier ce risque de contamination :
- La charge virale de la personne atteinte : il s’agit de la quantité de particules virales dans le sang, qui diminue, voire devient indétectable lors de la prise d’un traitement anti-VIH. Lorsque la charge virale est élevée, le risque de contamination est (grosso modo) multiplié par 50. Or, les personnes séropositives les plus susceptibles d’avoir des rapports non protégés sont celles qui ignorent leur séropositivité (et qui, par conséquent, ne prennent pas de traitement).
- Ces chiffres sont calculés pour un unique rapport. Ce n’est pas parce que vous avez eu un rapport non-protégé avec une personne séropositive, et la chance de ne rien attraper, que cela ne vous arrivera pas si vous recommencez. Le risque est multiplié avec le nombre de rapports. Vous pouvez aussi être contaminé lors du premier rapport. Et il suffit de manquer de bol une fois pour être dans le pétrin à vie.
- Les petites plaies, saignements, etc, ainsi que les infections sexuellement transmissibles, augmentent considérablement le risque de transmission.
Les autres MST et IST
Justement, parlons des autres maladies et infections sexuellement transmissibles. Le but n’est pas de se traumatiser en visionnant des kilomètres de photos de sexes pustuleux et suintants, ni de détailler précisément chaque maladie, mais de savoir à quoi faire gaffe, pour mieux minimiser les risques. (Pour les photos de maladies à des stades exagérément avancés : Google images . Pour les détails cliniques : les sites de prévention et Wikipédia).
Cette liste n’est pas exhaustive, mais, parmi les autres infections sexuellement transmissibles que vous voudrez éviter, on recense :
L’hépatite B
L’hépatite B est une maladie qui peut entraîner des complications et devenir chronique. Plus contagieuse que le VIH, elle se transmet lors d’un rapport sexuel sans préservatif, mais peut également se transmettre lors du partage d’objets de toilette tels que les brosses à dents, coupe-ongles, pinces à épiler etc. Il existe un vaccin pour s’en protéger.
L’hépatite C
Maladie qui peut s’installer à vie, l’hépatite C peut entraîner de graves dommages au foie, voire être mortelle. Elle se transmet principalement par le sang, bien que cela soit moins courant, elle peut également être transmise par voie sexuelle lors d’un rapport non protégé. Il n’y a pas de vaccin.
La syphilis
Autrefois, on mourait à coup sûr de la syphilis, après d’atroces souffrances à base de lésions dégoûtantes, de trous, de démence, de nez qui tombent et autres réjouissances dont se délecteront les amateurs de vieux croquis médicaux glauques. Fort heureusement, de nos jours, hop, une grosse piqûre d’antibiotiques (ou plusieurs, si c’est dépisté tard), et on en guérit sans se coltiner tous ses symptômes spectaculaires. La syphilis est extrêmement contagieuse, lors d’une pénétration, mais également lors d’un rapport sexuel oral (30 à 40% de “chances” d’être contaminé lors d’un rapport avec une personne atteinte).
La chlamydia et la gonorrhée
La chlamydia et la gonorrhée sont deux IST, asymptomatiques ou douloureuses selon les cas, qui peuvent entraîner des complications sur le long terme (et notamment la stérilité) si elles ne sont pas traitées faute de dépistage. Elles se soigne par antibiotiques.
L’herpès
Il y a plusieurs types d’herpès, dont l’herpès labial (le fameux “bouton de fièvre”) et l’herpès génital. Le virus est porté à vie mais ne se manifeste que par poussées. Les porteurs peuvent également être asymptomatiques. En effet, l’Organisation Mondiale de la Santé estime que 67 % de la population mondiale est porteuse du virus de l’herpès labial.
Mais, même s’il y a de fortes chances que vous portiez déjà le virus, il faut tout de même y faire attention, car ses deux versions peuvent être transmis d’une zone à l’autre, y compris sur une même personne. Pour ne pas l’attraper (ou éviter de le collectionner), pas de contact avec les zones où une poussée d’herpès se manifeste, tant que celle-ci n’est pas entièrement cicatrisée (rapports sexuel oraux, mais aussi bisous en cas de bouton de fièvre).
Le HPV
Le HPV (ou papillomavirus), susceptible d’augmenter le risque de cancer du col de l’utérus si l’infection persiste sur le long terme, est transmissible lors de la pénétration vaginale non protégée, ou du sexe oral. Il existe un vaccin.
La prévention des MST et des IST
Maintenant que nous avons énuméré les diverses inconvenances microbiennes auxquelles vous pourriez avoir affaire, passons au vif du sujet : comment les éviter ?
En milieu libertin ou pour un coup d’un soir, vous ne pouvez pas demander à vos partenaires de faire un test de dépistage. Enfin, vous pouvez toujours, mais celui-ci ne sera pas fiable pour garantir votre santé. Un test VIH négatif fait en laboratoire atteste que tout allait bien un mois avant la prise de sang. Il ne permet absolument pas de vérifier ce qu’il s’est passé entre temps. Pour un auto-test vendu en pharmacie, il y a un délai de trois mois. Êtes-vous prêt(e) à croire un(e) inconnu(e) sur parole quant à son usage infaillible du préservatif durant cette période, alors que cet(te) inconnu(e) est prêt(e) à passer en mode bareback avec vous ? Cela semble plus que risqué.
Les précautions minimales essentielles pour éviter les MST
- S’il y a pénétration : jamais sans préservatif (à part si c’est entre vous et votre moitié, avec qui vous avez déjà fait tous les tests nécessaires). Veillez à ce que le préservatif en question ait la bonne taille, et soit mis correctement. S’il y a alternance entre plusieurs partenaires, bien entendu, il faut systématiquement changer de capote. Il ne faut pas avoir peur de gaspiller les préservatifs : si celui en place subit quoi que ce soit qui puisse faire douter de son état ou de on bon positionnement, hop, on n’hésite pas à en déballer un nouveau.
- Si vous utilisez des sextoys, recouvrez-les d’un préservatif. Si le sextoy est partagé entre plusieurs personnes, même dans le feu de l’action, pensez à changer systématiquement de capote d’une personne à l’autre. Évitez les sextoys poreux, qui sont de véritables nids à microbes et ne peuvent pas être désinfectés convenablement. Les godes en métal, en verre et en silicone pur sont à privilégier, car on peut les faire bouillir pour les stériliser.
- Pas de sperme dans la bouche. Avaler ou recracher n’y change rien, c’est le contact entre le sperme et la muqueuse buccale qui présente un risque. Plus le liquide reste longtemps dans la bouche, plus le risque est élevé.
D’autres précautions bonnes à prendre
- Évitez le sexe oral en cas de mini-blessures dans la bouche (si l’on a un aphte, si l’on s’est mordu les joues, etc). Au préalable, évitez donc ce qui pourrait causer de petites coupures ou des irritations dans la bouche, les chewing-gums ultra-mentholés, les chips et autres bidules d’apéritifs croustillants, etc… Ne vous brossez pas les dents et n’utilisez pas de fil dentaire dans l’heure qui précède.
- Après le sexe oral, rincez-vous la bouche à l’eau, ou avec un bain de bouche sans alcool (pas de bains de bouche alcoolisés, qui peuvent irriter et augmenter les risques, ni de brossage dans l’heure qui suit).
- De manière générale, évitez le plus possible d’avoir des liquides corporels dans la bouche.
- Observez le corps de vos partenaires. Si vous voyez quoi que ce soit qui vous semble être un signe potentiel d’un problème de santé contagieux (un bouton, une verrue, une plaie, une sécrétion qui vous semble inhabituelle), trouvez un prétexte pour vous éclipser (de manière courtois(e) et discret(e), si possible).
Pour être safe au maximum
- Préservatif pour la fellation, digue dentaire (ou préservatif découpé pour en faire un rectangle) pour le cunni ou l’anulingus, préservatif enfilé sur les doigts ou gants en latex pour la pénétration. Les gens n’y sont pas forcément habitués, et le sujet peut être embarrassant à aborder, mais si vous souhaitez maximiser les précautions, vous avez le droit de refuser de faire sans.
Le dépistage de MST et des IST
Cela vaut pour libertins et les non-libertins : il est très important de faire des tests de dépistage régulièrement.
Faire un test ne coûte pas beaucoup d’efforts, et permet :
- De se rassurer : c’est cool de savoir qu’on n’a pas de chtouille.
- D’être soigné au plus tôt si jamais on a attrapé quelque chose. C’est d’autant plus important que beaucoup d’IST sont bénignes si on les traite à temps, et peuvent avoir des conséquences graves si on les laisse traîner sans s’en douter.
- D’être certain(e) ne rien refiler : choper une IST, déjà, ce n’est pas une partie de plaisir, mais c’est le genre de choses intimes que personne n’a envie de partager.
Comment faire un test de dépistage des MST et des IST ?
Plusieurs solutions pour faire un test de dépistage des MST et des IST :
Le centre de dépistage, anonyme et gratuit
Faire un test dans un centre de dépistage est anonyme et gratuit.
Une fois sur place, vous répondez à un questionnaire qui permet d’évaluer les risques que vous avez pris. Ça peut être un brin gênant, mais cela permet de déterminer les tests dont vous avez besoin. Ensuite, on vous donne un papier avec un numéro qui permettra de vous identifier pour retrouver votre dossier et vous donner vos résultats, puis une infirmière vous fait les examens nécessaires. Généralement, une prise de sang pour tester le VIH, les hépatites et la syphilis, et une analyse d’urine pour les chlamydia. Deux jours plus tard, vous repassez pour récupérer vos résultats, qu’un médecin vous explique en vous donnant quelques conseils de prévention.
L’avantage : c’est totalement anonyme. Vous n’avez pas besoin de montrer votre carte vitale ni d’avancer le moindre centime pour y aller. Donc si vous craignez pour votre discrétion ou si vous êtes à la dèche, c’est la solution adéquate.
L’inconvénient : les centres de dépistage sont souvent surchargés de boulot, et c’est sans rendez-vous. Vous allez donc probablement patienter longtemps dans la salle d’attente.
Un bilan MST prescrit par votre médecin
Pour faire un test de dépistage, vous pouvez également demander à votre médecin de vous prescrire un bilan MST.
Vous craignez que votre médecin vous juge ? Vous n’êtes pas obligé(e) de raconter vos exploits en détails, ni de raconter quoi que ce soit. Il ou elle vous demandera probablement si vous avez pris un risque récemment. Mais si vous ne souhaitez pas vous étaler sur le sujet, vous pouvez simplement dire que c’est pour faire le point et vérifier que tout va bien de ce côté-là. Toutefois, si votre situation est spécifique et nécessite un avis médical allant au-delà des analyses “classiques”, n’hésitez pas, déballez tout. Personne ne vous jugera, et mieux vaut se sentir un brin gêné qu’être mal soigné.
Il vous fera une ordonnance, avec laquelle vous pourrez vous rendre dans un labo d’analyses pour faire les tests.
L’avantage : C’est remboursé par la sécu (il suffit de se munir de sa carte vitale), l’attente n’est pas excessive, et on ne vous posera pas trop de questions. Bref, vous aurez droit à une analyse complète et on vous fichera globalement la paix.
L’auto-test VIH
L’auto-test VIH est vendu en pharmacie entre 25 et 30 euros.
L’avantage : vous n’aurez de comptes à rendre à personne, et le résultat est immédiat (15 minutes pour être exact).
L’inconvénient : il ne dépiste que le VIH, pas les autres MST, et le résultat est moins précis. L’auto-test teste pour les risques datant d’il y a plus de trois mois, contre un mois pour la prise de sang “classique”.
Source des illustrations : galeries Flickr de Peter Rivera, de Kerry J, de Guillaume Paumier, de SerjforiuS, d’Arte_ON, de thaths, d’Owen Byrne, de Fred Dunn, de Draco2008, et d’AIDS/SIDA NB, licence Creative Commons.